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Sans crainte, indifférent au païen qui murmure,
Marche dans ta justice et dans ta charité,
Triant le grain pourri de la vendange mûre
Que porte en fléchissant le cep que j’ai planté.

Car celui qui m’entend d’une oreille fidèle
A fondé sa maison sur l’immuable roc ;
Et les vents mugiront vainement autour d’elle
Et les flots impuissants s’useront dans leur choc.

Et tu tressailliras dans tes parvis en fête,
Sainte Jérusalem, quand, les temps révolus,
Le Fils de l’Homme, au sein de la Cité parfaite,
De gloire et de rayons vêtira ses Élus !

Et quand toi-même enfin, consumé par ta haine,
O Satan, foudroyé sur les derniers sommets,
Livide et tournoyant au fond de la Géhenne,
Dans la mort et le feu rouleras pour jamais ! —

Et Jésus se taisait tandis que sa pensée
Montait d’un vol divin vers le bleu firmament.
Mais le Démon tordait sa bouche convulsée
En un mélancolique et long ricanement :

— O vaine floraison des sagesses nouvelles,
Éclose et déjà morte aux lèvres des Docteurs !
Rabbi des derniers temps, la loi que tu révèles
Est comme un champ banal usé par les pasteurs.