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Or les jours annoncés par les voix prophétiques
Surgissaient lentement des siècles accomplis,
Et les Temps révélaient leurs mystères antiques,
Comme un voile écarté dont frissonnent les plis.

Et voilà que le mont sur ses rochers énormes
Oscillait et tremblait, tel qu’un rempart détruit,
Et que sur l’altitude apparaissaient deux formes
Faites de clarté blanche et de vivante nuit.

L’une, aux cheveux roux, grave, austère et solennelle,
Douce comme une aurore et triste comme un soir,
Reflétait tout l’azur en sa calme prunelle,
Pleine d’un feu mystique et d’un sublime espoir.

Et l’autre se dressait dans sa beauté farouche,
Le front cicatrisé, le rire obscène aux dents,
Superbe, dédaigneux, vomissant de sa bouche
Une haleine de flamme et des éclairs ardents.

C’étaient le Roi céleste et le Maître du monde,
Jésus de Nazareth et le noir Foudroyé,
Qui, d’en haut, contemplaient l’immensité profonde
Du changeant Univers devant eux déployé.

Et Satan, abritant de ses ailes funèbres
Le blond Nazaréen paisible et sans effroi,
D’un bras dominateur montrait, dans les ténèbres
Les royaumes sans nombre offerts au nouveau Roi.