Page:Guerne - Les Siècles morts, II, 1893.djvu/174

Cette page n’a pas encore été corrigée


Et l’Essénien pauvre, humble et méditatif,
Serrant un blanc méhil sur ses hanches étiques,
Craignant les taches d’huile et les marques de suif ;

Et le Pharisien, fidèle aux lois antiques,
Qui porte inscrits en noir sur sa mitre de lin
Des mots religieux en lettres hébraïques ;

Et le Grec consultant le rouleau Sibyllin,
Et le marchand d’Egypte et le guerrier barbare,
Tous, d’un peuple pressé couvrent le terre-plein.

Pâle, sur la terrasse interdite que barre
Un balustre incrusté de marbre rose et d’or,
Le Tétrarque se penche et recule et s’effare.

Perrière lui, l’œil dur, hautaine, belle encor,
Hérodias approche ; et sa gorge étincelle
Des deux joyaux divins volés au saint trésor.

Elle est impie, elle est sans remords, elle est celle
Qui murmure au Tyran des mots mystérieux,
Par qui le poison coule et le sang noir ruisselle.

Elle écarte en marchant sa robe aux plis soyeux
Et, la main sur le bras du Tétrarque qui pleure,
Lui parle sourdement en détournant les yeux :