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Gardien prédestiné des rouleaux symboliques
Où sont écrits les Noms en signes redoublés,
Si ta bouche, fermée aux paroles publiques,
Tait le nombre infini des ordres angéliques :
Par l’extase et la foi monte aux cieux étoilés.

Armé de la doctrine et du gage indicible,
Cuirassé du secret, souffre et meurs sans fléchir ;
Dévoré par le feu, percé comme une cible,
Délivre des liens de ton corps invincible
Ton âme lumineuse et prompte à s’affranchir.

Que la Thora révèle à ton âme accomplie
Le sens de chaque lettre et le mystère obscur ;
Que l’Esprit vagabond t’emporte comme Élie
Et devant tes regards allume et multiplie
Des constellations dans le magique azur.

Des célestes coteaux récoltant les vendanges,
Libre, purifié, marqué du sceau divin,
Plane sur l’aile d’or des visions étranges
Et, vieillard prophétique inspiré par les Anges,
Du Tétragramme auguste enivre-toi sans fin ! —

Tel l’ascète a parlé ; tel encore il s’abîme
Au gouffre du mystère et du songe éternel.
Etranger, l’ombre gagne ; un silence sublime
Endort les noirs rochers, les ravins et la cime ;
Seule au fond de la nuit pleure la Mer de Sel.