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La Reine Égyptienne infâme et prisonnière
Du sang de ses pieds nus empourprer la poussière.

Mais là-bas, sous le ciel ardent, immense et beau
Comme un palais sacré, sombre comme un tombeau,
Tourné vers l’Occident, un royal édifice
Sur le cap isolé dresse sa paroi lisse.
Nul bruit ; ni pas furtifs, ni chocs, ni cris soudains.
Lé silence du jour et la paix des jardins
Bercent lugubrement la maison sépulcrale.
La herse de bois dur clôt la porte centrale,
Et par nulle fenêtre aucun souffle dans l’air
N’apporte, vers le soir, les senteurs de la mer.

La Reine Cléopâtre est là, captive et veuve.
Belle et parée encor pour la suprême épreuve,
Elle étend sur un lit d’ivoire et d’or sculpté
L’immortelle splendeur de son corps enchanté.
Le temps n’a point flétri sa chair impérissable ;
Tel le vent du désert, en balayant le sable,
Glisse sans le rider sur le granit poli.
Ni les Dieux, ni les ans, ni le rapide oubli,
N’ont desséché la fleur de sa grâce éternelle.
La jeunesse et l’amour germent toujours en elle
Comme deux blancs lotos sur le Fleuve azuré.

Elle attend, immobile, en son repos sacré.

Telle qu’au front d’Isis, la divine coiffure