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DOROTHÉOS.

Passez, amis, passez ! Si la vie est pareille
A quelque fruit pourpré qui se dessèche enfin,
J’en ai pressé le jus sur ma lèvre vermeille ;
J’ai satisfait ma soif et j’ai nourri ma faim.
Le joug religieux qu’avaient forgé mes pères
Ne charge plus mon col de son poids importun.
Je marche libre et seul en mes vergers prospères,
Loin du chemin banal et du sentier commun.
Vos Dieux de marbre blanc peuplent le vestibule
De la riche demeure où mon rêve se plaît,
Et Sosyklès lui-même a sculpté la fibule
De mon manteau tissé de byssos violet.
La science hellénique et la sage parole
Ont fleuri dans mon âme, en mes jours studieux,
Quand suivant Hermippos aux jardins de l’École
Et concevant l’essence et l’unité des Dieux,
En notre Adonaï je voyais transparaître
Ta sombre majesté, Kronos vindicatif.
O visions, divins songes, formes de l’Être,
Vaines réalités du monde primitif,
Dieux, Déesses, Esprits semblables à nos anges,
Salut ! Temples muets, temples de marbre et d’or,
Je vous ai consacrés à des cultes étranges,
A des Dieux fraternels que je salue encor !