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Des corps douteux d’enfants pour tes plaisirs infâmes :
Ta gloire est un soleil que la nuit proche attend.

Écoutez ! Le grand Dieu souffle dans ma poitrine
L’annonce des malheurs et leur vieille origine.
Malheur ! tous condamnés et tous frappés sans fin !
Tous du nord au midi ! Toi-même, ô Race juste
Qu’abrite, en ta cité, l’ombre du Temple auguste,
Tu fléchiras la nuque au poids du bras divin.

Et tes jours cependant coulaient dans l’innocence,
Sans souci de ces Dieux qu’un peuple impur encense.
Tes yeux ne tentaient pas, au firmament trompeur,
De suivre dans son vol la mouvante Fortune ;
Et les astres fuyants, le soleil et la lune
En ton cœur assuré n’engendraient point la peur.

Tes champs n’ont pas connu de mesure inégale ;
Le pauvre trouvait place à la table frugale
Où tu siégeais le soir, candide et partageant
Avec la veuve en pleurs ton huile la plus fraîche,
Ton vin avec celui dont la gorge était sèche,
Et jusqu’au dernier grain l’orge avec l’indigent.

Qu’importe ! Puisqu’un jour, un seul instant perfide,
Tu dédaignas l’autel du temple laissé vide,
Le châtiment t’accable et ton sol dévasté,
Semé de vains débris, d’inertes simulacres,