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Éteignez les flambeaux ! Voix de l’Hiérophante,
Que l’airain creux prolonge et gonfle dans les nuits,
Résonne ! et fais surgir au bout des noirs circuits
Les apparitions que la terreur enfante !

Ici, c’est Nysios aux souffles odorants.
Voici les champs aimés où l’olivier s’effeuille
Et la molle prairie où Perséphonè cueille
Le haut narcisse éclos parmi les bleus safran s.

Avec tes chastes sœurs, Vierge aux belles chevilles,
Pour la dernière fois bondis dans les gazons
Et remplis ta corbeille et fauche les moissons
Des glaïeuls empourprés et des pâles jonquilles.

Car, du sein de Gaïa prenant son rude essor,
L’insatiable Roi, fils de Kronos, s’élance.
Et nulle n’entendit, dans le morne silence,
La Vierge aux bras du Dieu pleurer sur le char d’or.

Le Tartaros profond ouvre à sa triste Reine
L’empire désolé des éternels tourments ;
L’obscurité farouche éteint tes yeux charmants,
Epouse de Hadès dans l’ombre souterraine !

Et voilà qu’au hasard la grande Déméter,
Hâve, le front voilé, cherchant la Vierge blonde,
Comme une mère en deuil, fuit, à travers le monde.
Le firmament complice et le splendide Aither.