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LE SURVENANT

Mais Venant, impuissant au moindre mouvement, ricanait, muet, indifférent et lointain.

— Et l’argent ? Et les outils ? Quoi c’est que t’en as fait ?

Au ton sévère de la jeune femme, Venant leva les sourcils, dans un effort pour comprendre. Les yeux égarés il regardait partout, cherchant à comprendre. Il parvint à tourner ses poches à l’envers. Elles étaient vides. Seul un petit crucifix en tomba. Alphonsine ramassa la croix de chapelet à laquelle un christ d’étain ne pendait plus que par une main.

— Où est mon beau-père ?

Hoquetant, la bouche épaisse, butant à chaque syllabe ou mangeant ses mots, le Survenant finit par dire :

— Le père ?… Il est allé… voir… sa blonde…

— Tu dis ? Parle donc franchement, insista Alphonsine qu’une vague inquiétude gagnait

— Ben quoi ?… J’suis pas chaud… j’ai bu rien qu’un coup… Écoute, la petite mère… Paye-moi un coup… puis on va se parler. Le père Didace… il est en amour… avec…

Elle courut à la pompe emplir le gobelet et l’offrit à Venant. Sitôt qu’il y eut goûté il cracha l’eau et fit voler le gobelet sur le plancher.

— Bougre de salaud, lui cria Alphonsine, indignée.