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telles ou telles souffrances, elles quittent celui où la divine Majesté se voulait servir d’elles ; elles sortent de ses saintes dispositions et cela l’oblige de les laisser dans les mains de leur conseil, puisqu’elles aiment mieux suivre leur route que la sienne. » D’ailleurs, pour calmer les scrupules de mes amis, je précisais : « Je ne demande pas à la Providence de m’ouvrir la porte toute grande. Qu’elle l’entrouvre seulement et je passerai. » La porte faillit s’ouvrir. Dans une lettre du 30 janvier 1913, mon ancien professeur, l’abbé Sylvio Corbeil, me veut au Séminaire de Sainte-Thérèse. Il sollicite même pour moi le poste de professeur de Rhétorique. Vers le même temps, l’abbé Arthur Papineau, vieil ami de collège, est devenu fondateur du Collège Saint-Jean-sur-Richelieu. Il organise son personnel. Appuyé du grand vicaire de Montréal, Mgr Émile Roy (celui qu’on appelait le « Grand Roy »), qui m’avait en particulière affection, l’abbé Papineau m’offre en son collège le poste de professeur de Rhétorique. Je lui réponds : « Fais la première démarche auprès de mon évêque ; je ferai la seconde. » Il écrit à Mgr Émard, fin de décembre 1912 ou début de janvier 1913. Les semaines, les mois passent. Point de réponse. Tout à coup j’apprends que Mgr Émard s’embarque pour l’Europe. J’écris à l’abbé Papineau de revenir à la charge et de se hâter. Il réécrit. La veille ou le jour du départ de Monseigneur, il reçoit de M. Dorais, grand vicaire, un simple accusé de réception de sa deuxième lettre. L’accusé de réception, daté du 23 mars 1913, se lit comme suit : « Je suis chargé par Monseigneur l’Évêque de Valleyfield, d’accuser réception de votre lettre du 20 courant. » Un point, c’est tout. Je me suis engagé à faire la seconde démarche. Le 20 mai 1913, j’écris donc à Mgr Émard, à Rome, au Collège canadien. Je le mets au courant de l’invitation qui m’est venue du fondateur du Collège de Saint-Jean. Et comme le style diplomatique n’a jamais été mon fort, j’avoue clairement à mon évêque qu’il pourrait avoir d’excellents motifs de me laisser partir sans regret. La porte va-t-elle s’entrebâiller ? Le 6 juin 1913, je