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Ce simple exposé d'une cause, qui n'a plus guère de partisans, comportera, je Tespère, son enseignement et sa réfutation. Et après que nous aurons salué d'un regard respectueux un homme d'ancien régime, qui fut grand par ses rêves, ses exagérations, ses illusions mêmes, nous n'aurons que plus de joie à suivre l'étoile de nos destinées nouvelles, et à élever notre cœur vers le présent, vers l'avenir !

11 est temps d'entrer dans le détail de l'œuvre extraor- dinaire de notre héros. Barbey d'Aurevilly nous y apparaîtra comme un chevalier des siècles passés, brandissant le glorieux bouclier de ses ancêtres et bardé de leur armure des grands jours de combat. Ainsi revêtu de pied en cap, il a lancé d'audacieux défis à la société moderne et jeté un « nescio vos » énergique à la face des hommes d'aujourd'hui. Cependant il a parfois mis de côté ses armes offensives et défensives, pour donner libre cours à ses émotions, pour se laisser gagner par le mélancohque souvenir des choses qui ne sont plus. De la sorte, son culte « individualiste » et « romantique » pour l'Aristocratie, le Catholicisme et la Normandie, se faisait tour à tour agressif ou simplement pieux. Mais quelque forme qu'aient prise tous ces cultes, qui à ses yeux étaient inséparables, Barbey d'Aurevilly leur doit ses meilleures inspirations. Voilà le « triple airain » dont il a cuirassé son existence si fière et où il a enfermé son œuvre si noble pour les défendre l'une et l'autre contre les atteintes du temps. Sa mémoire et ses écrits y seront à jamais conservés, et, avec leur allure successivement guerrière et pacifique, sont marqués pour l'éternité du sceau de Ce qui ne meurt pas.