Page:Grelé - Jules Barbey d’Aurevilly, L’œuvre, 1904.djvu/121

Cette page n’a pas encore été corrigée

— 117 —

tends crier d'une voix de stentor et avec la fougue qu'on lui connaît : Que prouvent donc ces airs effarouchés dont certains se font un masque de voi-tu à tout propos et hors de tout propos ? Celte attitude n'est-elle pas l'ordinaire monopole des gens qui ont peur d'apercevoir les verrues de l'humanité ou qui tiennent, avec une complaisance plus coupable encore, à les choyer en secret au fond de leur ame? N'est-il pas nécessaire d'étu- dier les maladies pour les guérir? N'est-il pas bon que de temps en temps on mette à nu les plaies qui rongent le cœur humain, cette besogne n'eût-elle d'autre résultat que de faire rougir les Tartufes ! — C'est ainsi que Barbey d'Aurevilly eût présenté sa défense, — dans les rares jours où il condescendait à plaider pro <:?o;>^o et à s'expliquer devant le public.

Mais notre époque, sans être « puritaine », semble réfractaire à de semblables théories. A ceux qui font profession d'une grande rigidité de principes, on demande expressément de conformer leurs actes à leurs croyances. C'est peut-être même sur ce point que l'opinion moderne se montre le plus exigeante et chatouilleuse. Et, certes, elle n'a pas tort. Seulement, Barbey d'Aurevilly n'a que du mépris pour les idées étriquées de son temps. C'est un homme du passé qui n'a rien de commun avec les hommes d'aujourd'hui et dont toutes les racines plongent au sein de l'ancien régime. Il fait donc appel à l'exemple d'autrefois contre les prétentions du présent.

Est-ce qu'un Ronsard, un Bertaut, un Régnier, un Malherbe et même un Rabelais ne joignaient pas aux plus solides convictions dogmatiques une grande liberté de langage et de mœurs ? Est-ce que Racine, l'homme le plus profondément chrétien de son siècle avec Bossuet et Pascal, s'est jamais interdit de peindre la passion sous