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si pourrie soit-elle, ne se font-elles pas en partie, sur la confiance et la bonne foi des uns des autres ? Le commerce pourrait-il marcher une seule minute, s’il ne pouvait compter, pour se défendre, que sur la peur de la loi ?


La loi ne punit et ne peut punir que la transgression dont on connaître l’auteur ; mais comme l’individu, chaque fois qu’il commet un acte réprouvé, — soit qu’il le juge tel lui-même, soit qu’il soit ainsi qualifié par la loi — ne le commet qu’avec la certitude de ne pas être découvert[1], ou que la satisfaction qu’il en tire, compensera largement les privations que lui occasionnera la peine qu’il pourra encourir. La loi est donc impuissante à prévenir la transgression, lorsque les mobiles y incitant l’individu sont plus forts que les motifs de crainte. Certains prétendent qu’il faut renforcer la sévérité des lois. Nous venons de voir, qu’au moyen âge, elles étaient des plus féroces et sans effet. Il arrive un moment du reste où la pénalité est hors de proportion avec le délit, et où les plus féroces « punisseurs » sont forcés de consentir à des adoucissements. Tout cela prouve donc que la répression n’est pas le remède.

D’autre part, avec la loi, les individus ne se peuvent faire justice eux-mêmes, l’individu est donc à l’abri, s’il a l’intelligence de combiner son acte de façon à pouvoir l’accomplir sans témoins.

De plus, la loi est arbitraire, car, pour juger elle

  1. Bien entendu, nous parlons des actes prémédités, et non des actes accomplis sous la pression de la colère, que la loi est encore bien moins capable de prévenir.