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rechercher et de se grouper, selon leurs tendances, selon leurs affinités. Établir un mode unique d’organisation, sous lequel tout le monde devrait se plier, et que l’on imposerait sitôt après la révolution, est une utopie ; ce serait faire œuvre de réactionnaire, entraver l’évolution de la société future, vouloir mettre des bornes au progrès, le retenir dans les limites que notre courte vue peut embrasser. Étant donnée la diversité de caractères, de tempéraments et de conceptions qui existe parmi les individus, il n’y a que le doctrinarisme le plus étroit, qui puisse concevoir un cadre dans lequel la société serait appelée, de gré ou de force, à se mouvoir.

Rien ne nous dit que tel idéal qui nous éblouit aujourd’hui, répondra à nos besoins de demain, et surtout aux besoins des individus appelés à composer cette société. Ce qui a frappé d’impuissance et de stérilité, jusqu’à aujourd’hui, toutes les écoles socialistes, sans distinction de nuance, c’est que toutes, dans leurs projets d’avenir, avaient la prétention de vouloir régler et prévoir d’avance l’évolution des individus. Dans les sociétés qu’elles rêvaient d’établir, rien n’était laissé à l’initiative individuelle. Dans leur profonde sagesse, les sociologues avaient d’avance décrété ce qui était bon ou nuisible aux individus, ces derniers devaient s’incliner et ne demander rien autre que ce que leurs « bienfaiteurs » jugeraient bon de leur offrir. En sorte que ce qui répondait aux aspirations des uns, venait en travers des desiderata des autres : de là, dissension, lutte et impossibilité de créer rien de durable.

Ce que nous présentons ici ne peut avoir que la valeur d’une conception individuelle qui, dans la pra-