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Mais l’individu n’est pas une entité, il n’existe pas seul, il est tiré à plus d’un milliard d’exemplaires qui se dressent sur la terre en face les uns des autres, avec des aptitudes équivalentes sinon semblables, et ayant la ferme volonté d’user de leur droit de vivre. Les individualistes qui prêchent le culte du « Moi », érigent l’Individu en entité font de la métaphysique transcendantale, aussi absurde que les prêtres qui ont imaginé Dieu.

L’individu a droit à la satisfaction de tous ses besoins, à l’expansion de toute son individualité, mais puisqu’il n’est pas seul sur la terre et que le droit du dernier venu est aussi imprescriptible que celui du premier arrivé, il est évident qu’il n’y avait que deux solutions pour que ces droits divers s’exerçassent : la Guerre, ou l’association !

Mais, rarement, l’esprit humain se range aux décisions catégoriques. Les circonstances, du reste entraînent les individus avant qu’ils aient le temps de s’expliquer leurs actes, ce n’est qu’après coup qu’on essaie d’en tirer la philosophie.

Le conflit a donc éclaté entre ces droits divers, conflits mélangés de tentatives de solidarisation. L’humanité a entrevu que la solidarité lui serait profitable, mais l’égoïsme féroce de certains qui n’ont vu que le bénéfice présent, sans calculer le mal qu’il entraîne, a empêché l’humanité d’évoluer franchement vers une solidarité complète. L’état de lutte s’est maintenu dans les sociétés qui étaient un commencement de pratique solidariste. Et voilà des centaines de siècles — pour ne parler que de la période historique — que dure cet état mixte de lutte et de solidarité, voilà des milliers d’années que, par la volonté d’une