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sur cet emplacement une chapelle en ruine appelée « chapelle de David », ils s’en plaignirent au pape, lui disant qu’à la fin les Juifs s’empareraient encore de l’église du Saint-Sépulcre. Immédiatement, le pape publia une bulle pour défendre à tout capitaine de navire chrétien de recevoir des Juifs sur un vaisseau à destination de la Terre Sainte. Et comme c’étaient surtout des vaisseaux vénitiens qui se rendaient alors aux échelles du Levant, il insista auprès du doge pour qu’il recommandât, de son côté, aux navigateurs de Venise de tenir compte de cette bulle. Mais, quand les souverains chrétiens crurent avoir enfin fermé toute issue aux Juifs, comme à un fauve qu’on traque de toutes parts, la Turquie, ainsi qu’on l’a vu plus haut, leur offrit un asile. Avant qu’un demi-siècle fût passé, cet asile dut s’ouvrir pour recevoir une partie des malheureux expulsés de la péninsule ibérique.


CHAPITRE XIV


Recrudescence de violences à l’égard des Juifs et des Marranes
(1455-1485)


L’Espagne devenait de moins en moins habitable pour les Juifs, en dépit des services considérables qu’ils avaient rendus à ce pays. De tous côtés s’élevaient contre eux d’implacables ennemis. Leur situation paraissait pourtant satisfaisante sous le règne de Don Henri IV (1457-1474), roi de Castille, et de Don Juan II (1450-1479), roi d’Aragon ; mais c’était là le calme trompeur qui précède la tempête. Henri IV, peut-être encore plus indolent que son père, était bon et généreux jusqu’à la prodigalité, pas très soumis à l’Église et peu préoccupé de savoir si les lois canoniques concernant les Juifs leur étaient réellement appliquées. À l’exemple de son père, il abandonna la direction des affaires à un favori, Juan de Pacheco, qui, tout en descendant de la famille juive Ruy