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autre chose pour leur extorquer de l’argent. Le clergé et les moines, tous ces faux prêtres lancent des imprécations contre ma malheureuse nation et disent : Nous la persécuterons jusqu’à complète extermination ; que le nom d’Israël disparaisse à jamais ! Leur foi leur paraissait en danger, parce que les Juifs de Jérusalem pouvaient à la rigueur acheter l’église du Saint-Sépulcre. Voilà pourquoi ils ont donné ordre de jeter dans les flots tout Juif embarqué sur un navire chrétien qui fait voile vers l’Orient. Que les saintes communautés d’Allemagne sont maltraitées ! qu’elles sont déchues ! — Mes frères et mes maîtres, et vous tous, mes amis, moi, Isaac Çarfati, originaire de France et né en Allemagne, dont j’ai fréquenté les écoles, je vous annonce que la Turquie est un pays où l’on ne manque de rien. Chacun peut y vivre en sécurité, à l’ombre de son figuier et de sa vigne. Dans les pays chrétiens, si vous habillez vos enfants en bleu ou en rouge, vous exposez leurs corps à être rendus bleus ou rouges par les coups. On vous oblige à vous couvrir de misérables haillons. Pour vous, les jours de la semaine aussi bien que les jours de sabbat et de fête sont tous sombres. Des étrangers seuls jouissent de votre fortune. Quelle satisfaction le Juif fiche a-t-il de ses trésors ? Il ne les conserve que pour son malheur. Un beau jour, ses ennemis inventent une calomnie contre lui et les lui enlèvent. Vous les appelez vôtres ; en réalité, c’est à eux qu’ils appartiennent. Ils n’épargnent ni les savants ni les vieillards. Eussent-ils scellé leurs promesses de soixante sceaux, ils n’hésitent pas à les violer. Toujours prêts à vous infliger des amendes et des tortures, et à vous piller, ils ferment vos temples et vos écoles. Israël, pourquoi dors-tu ? Lève-toi et abandonne ce pays maudit.

À la suite de l’appel de Çarfati, bien des Juifs se préparèrent à se rendre en Palestine et en Turquie. Mais les chrétiens ne leur laissèrent même pas la liberté d’échapper à leurs maux ; il leur fut défendu d’émigrer.

L’interdiction qui leur fut faite de se rendre en Palestine avait été inspirée par un motif tout spécial. Un pacha avait autorisé les habitants juifs de Jérusalem à construire une synagogue sur une certaine partie de la montagne de Sion. Comme cet emplacement touchait une propriété des franciscains, ou que ceux-ci possédaient