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UN CŒUR VIRGINAL

passait sa main sous l’étoffe et atteignait la chair douce d’un sein éperdu de peur et de bonheur. Jusqu’alors il n’avait pressé la poitrine de son amie que sur la robe. C’était doux, mais équivoque. La franchise de la chair donnait des sensations bien plus naturelles, si naturelles que Rose, après le premier émoi, se laissa aller sans remords aux émotions de cette nouvelle caresse. La main qui enclavait son jeune sein et en écrasait doucement la pointe raidie se glissa vers l’aisselle, et l’attouchement plus charnel encore, sans doute par similitude, acheva d’attendrir la sensibilité bienveillante de la jeune fille. Sa bouche mouillée se laissait manger comme un fruit très mûr ; quand la morsure tardait, elle la provoquait câlinement. Un double sursaut arrêta enfin le double festin, et il n’y eut plus, assis l’un près de l’autre, que deux amants à la fois heureux et mal satisfaits. L’un se demandait si l’amour n’avait pas de plus complètes fêtes, et l’autre se disait : quel dommage d’être un honnête homme !

M. Hervart se croyait en ce moment très