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tation de l'organisme aux sensations extérieures, pour percevoir toujours le même degré d’émotion). Marie Dauguet, et c’est ce que sa poésie nous apporte de plus nouveau, nous fait entrevoir la possibilité d’une volupté nouvelle : la volupté des odeurs, goûtée savamment, écoutée, ressentie comme une musique :

Parfums, ne laissez pas, ainsi que la musique,
Notre chair et notre âme immensément déçues ;
Elle doit exister cette joie frénétique
Que vous nous désignez, si vaguement perçue ;

Jetez-la sur nos cœurs soulevés, sanglotants,
Dans cette heure électrique et par l’éclair hantée ;
Et fallût-il mourir après l’avoir goûtée,
Je ne me défends pas… je suis là… et j’attends.

L’homme orgueilleusement ramène tout à lui. Mais le parfum des fleurs ne jaillit pas pour lui des corolles et des calices : il n’est qu’un appât pour les insectes, colporteurs des pollens. Nous trouvons cependant dans ces parfums une exci-