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une plénitude d’amour. D’autres fois, peut-être, tu as été ainsi, oui, tu l’as été, mais je ne l’avais pas senti de même ; nous n’avions pas encore correspondu si profondément.

Le sentiment et la sensation vraies s’avivent à se répéter, au lieu de s’émousser ; on se pénètre plus intimement ; on comprend mieux tout, les moindres gestes, les regards, les mouvements des lèvres où l’âme s’épanouit en floraison de baisers. Chaque fois c’est une plus complète prise de possession mutuelle, et tu es difficile à conquérir ; en toi, en moi aussi, peut-être, il y a des instants qui déroutent, quand nos fiertés se rencontrent front à front.

Mais comme au fond de nos êtres nous nous aimons et quelle joie de le penser et de le repenser !

Je suis heureux par toi, ma chère âme, et je ne l’avais jamais été. Tu me fais vivre comme je ne