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Oui, si le contraire de la vérité n’est qu’une des faces de la vérité, ce qui est assez probable.

Il est fâcheux qu’on ne discute pas davantage les notions théologiques de M. Bloy ; elles sont curieuses par leur tendance vaine vers l’absolu. Vaine, car l’absolu, c’est la paix profonde au fond des immensités silencieuses, c’est la pensée contemplative d’elle-même, c’est l’unité. Les efforts magnifiques de M. Bloy ne l’ont pas encore sorti assez souvent du chaos des polémiques contradictoires ; mais s’il n’a pas été, aussi souvent qu’il aurait dû, le mystique éperdu et glorieux qui profère les « paroles de Dieu », il l’a peut-être été plus souvent que tout autre ; il a été éliséen en certaines pages de la Femme Pauvre.

Comme écrivain pur et simple, — c’est le seul Bloy accessible au lecteur désintéressé de la crise surnaturelle, — l’auteur du Désespéré a reçu tous les dons ; il est même amusant ; il y a du rire dans les plus effrénées de ses diatribes : la galerie de portraits qui s’étage en ce roman du LVe au LXe chapitre est le plus extraordinaire recueil des injures les plus sanglantes, les plus boueuses et les plus spirituelles. On voudrait, pour la sécurité de la joie, ignorer que ces masques couvrent des visages ; mais