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Car mon âme est pareille aux déserts monotones
Assoupis dans l’oubli stérile des saisons.


Quelques mois avant sa mort, il dit, en un doux et beau vers, son état d’âme :


Nous sommes les amants tristes parmi les fleurs.


Cependant, vers le même temps, le poète eut des heures heureuses, des moments de joies et d’espoir :

Joyeuses, sur les claires ondes
D’un golfe paisible et splendide,
Des galères aux voiles blondes
Appareillent pour l’Atlantide.

Et des lys ravis par les brises
Neigent dans la douce venelle,
Tandis qu’au loin des voix éprises
Proclament la joie éternelle.

Et ceci, tiré de l’Île Heureuse :

Dans le golfe aux jardins ombreux,
Des couples blonds d’amants heureux
Ont fleuri les mâts langoureux
De la galère,
Et, caressé du doux été,
Notre beau navire enchanté
Vers les pays de volupté
Fend l’onde claire !