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qu’une imagination pratique, une critique à conséquences immédiates et certaines.

Il n’y eut là aucun phénomène de dédoublement ou de rénovation : une intelligence naturellement réaliste s’adaptait à des fonctions réalistes, comme, d’abord, elle s’était adaptée, en littérature, à l’analyse logique et minutieuse de la réalité. Écrire un roman ou le vivre, il n’y a entre les deux occupations qu’une différence musculaire, tout extérieure : quel que soit le geste, le travail du cerveau est identique ; l’équivalence est parfaite entre l’acte et l’idée de l’acte, ce qui rend inutile leur superposition ; devenu matériellement actif, et avec surabondance, M. Vallette ne pouvait plus écrire ; s’il abandonnait ses fonctions actuelles, il se remettrait à écrire, immédiatement. C’est la rivière qui, selon la vanne remontée ou descendue, coule par ici ou par là. L’intelligence n’est libre que dans les limites des lois dynamiques.

Il faut cependant noter que l’activité extérieure de M. Vallette surpasse ce qu’on lui a connu d’activité intérieure. Il n’aurait jamais été un écrivain fécond, de ceux qui, l’œuvre achevée, la jettent sans souci, déjà pleins d’un amour exclusif pour celle qui va naître. Capable de s’abstraire pendant