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Il y a à Thanguenau un pasteur protestant qui guérit, dit-on, les douleurs par l’imposition des mains, à l’exemple du Christ. Je n’y crois guère, mais tante est venue ; elle a profité de mon séjour ici pour entreprendre ce voyage et cette cure. On voit d’ici le clocher de l’église du pasteur, là, dans ce bas, au bord de l’eau. C’est presque ton chemin pour t’en aller, passe-y donc ; elle est si malade et elle sera si contente de t’embrasser !

— Oui, j’y passerai ; elle nous aime à sa manière, car elle nous a fait bien du mal avec sa jalousie. On peut dire que c’est elle qui a entretenu la semence de division chez nous, qui a chassé notre mère ; mais elle est l’unique survivante de la famille de notre père, nous lui devons le respect et des égards. Je vais te quitter, mon frère aimé, à bientôt maintenant, au mariage de notre sœur ! »

Les deux frères s’embrassèrent encore, et chacun, d’un bord différent, reprit le chemin de son pays. Wilhem, d’un pas rapide, et Henri, par bonds, dégringolant la pente des vignes jusqu’au village où se voyait l’église.

Il était nuit, mais pas tard ; partout, aux fenêtres on voyait encore de la lumière, et quand le jeune homme frappa à l’une d’elles pour savoir où logeait le pasteur, un habitant sortit avec empressement.

« Entrez, dit-il, hospitalier, en voyant un soldat avec sac et fusil ; vous venez loger ici ?