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PRÉFACE.

deſſein de nous être utile ; la reine, en faiſant diſparoître l’étiquette a perdu le reſpect des Français ; j’ai fait jadis une obſervation à ſon égard connue de vingt perſonnes. Il y a à-peu-près quatorze ans que je me trouvai à la porte de la comédie francaiſe quand la reine arriva, jeune, élégante, telle qu’on voit nos petites maîtreſſes les plus recherchées ; ſon air, ſon ton enchantoient les yeux ; mais on murmuroit tout bas. Je dis tout haut : adieu la majeſté royale, un jour cette reine verſera des larmes de ſang ſur ſon inconſéquence ; le pronoſtic ne s’eſt que trop réaliſé. Mais l’inconféquence n’eſt pas vice ; elle eſt attachée à la jeuneſſe, et fait ſouvent l’éloge de l’innocence ; une reine doit-elle être exempte de cette innocence ? Les uns diront oui, les autres diront non ; moi je dis que ce qui eſt fait eſt fait, et ne voyons, mes concitoyens ; que l’avenir. Je plains d’autant plus la reine, que peut-être elle n’a aucuns reproches à ſe faire de tout ce dont on l’accuſe contre le peuple français ; elle n’a donc pas de vrais amis ! Tous les écrivailleurs ont écrit contre elle, et perſonne n’a pris la plume pour la justifier, perſonne n’a eu le noble courage de l’avertir de ce qu’elle doit aux Français, de ce qu’elle ſe doit à elle-même dans un moment comme celui-ci ; ſi il y a un com-