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les plus alertes. Le christianisme s’est trop longtemps tenu sur la défensive, se contentant de parer les coups qui lui étaient portés et ne les parant qu’imparfaitement. Le service que Pascal a rendu à sa cause, c’est de lui montrer qu’il pouvait changer les chances du combat en changeant les positions des combattants. Il n’est aucun des adversaires du christianisme, même parmi les mieux armés, qui, par mille côtés à la fois, ne prête le flanc aux plus vigoureuses attaques, et qui, même avec les seules armes de la raison, ne puisse être aussi vigoureusement attaqué que jamais le christianisme ne l’a été.

Cela aussi, Pascal l’a prouvé d’une façon péremptoire ; et c’est la seconde raison par laquelle son attitude se recommande. Son dessein était de montrer « que la religion chrétienne avait autant de marques de certitude et d’évidence que les choses qui sont reçues dans le monde pour les plus indubitables » — Et il a pleinement réalisé ce dessein, non pas par une preuve directe de la vérité de la religion chrétienne, mais en abaissant les arrogantes présomptions des puissances hostiles, de la philosophie, de la science, de la politique même, de la raison surtout, leur porte-parole à toutes, et en les forçant toutes ensemble, par des coups dont la force et la justesse nous confondent encore, à élever tout au moins la religion chrétienne à leur niveau, en ce qui concerne la certitude rationnelle. N’est-ce pas là ce qu’il nous faut encore aujourd’hui ? Que reproche-t-on au christianisme ? d’être en contradiction avec les données de la raison : on lui jette constamment à la face le paradoxe : « credo quia absurdum », et la boutade ironique : « abêtissez-vous ». Nous ne rentrerons pas dans le débat ; ce serait nous renfermer de nouveau dans le cercle que Pascal a brisé : dans la mesure où la raison a dévié, comme tout l’être