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blantes sur le cramoisi des fonds, sur les harmonies et les splendeurs sourdes d’un colossal Titien !

Madame Gervaisais arrivait à cet état vague et un peu troublé de faiblesse que font dans ces cérémonies la longue lassitude, l’attention fatiguée des sens. Sa contemplation était répandue et errante, quand tout à coup elle fut secouée et réveillée par un chant tel qu’elle n’en avait jamais entendu de pareil, une plainte où gémissait la fin d’un monde, une musique originale et inconnue où se mêlaient les insultes d’une tourbe furieuse, un récitatif lent et solennel d’une parole lointaine de l’histoire, une basse-taille touchant aux infinis des profondeurs de l’âme.

C’était, chanté par les trois diacres, le plain-chant dramatisé de la Passion de Jésus-Christ, selon l’Évangile de saint Matthieu.

Charmée nerveusement, avec de petits tressaillements derrière la tête, madame Gervaisais demeurait, languissamment navrée sous le bruit grave de cette basse ba-