Page:Goncourt - Journal, t8, 1895.djvu/130

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

fébrilement dilaté, la bouche contractée comme en une dégustation gourmande, Groult au milieu de paroles en déroute, coupées par cette phrase : « Vous les verrez, Monsieur, chez moi ! » me parle d’un Constable, d’un Constable qui tue toute la peinture française de 1830, acheté 340 francs dans un Mont-de-piété à Londres, et d’autres, d’autres acquisitions… et de deux Péronneau, deux Péronneau, achetés à quatre ou cinq heures de Bordeaux… achetés dans une propriété à laquelle on n’arrivait qu’au moyen d’une mauvaise carriole… Et le marché conclu, et M. Groult se disposant à les porter dans la voiture, la femme qui venait de les lui vendre, lui disant : « Il y a encore une condition… ce sont mes aïeux… et je ne consentirai à les laisser sortir, que la nuit tombée. » Et la vendeuse promenait dans les vignes son vendeur jusqu’au crépuscule. Ne trouvez-vous pas quelque chose de joliment superstitieux, dans l’arrangement de cette femme, pour que ces portraits de famille ne puissent pas se voir sortir de chez eux ?

Ce soir, il était question d’une chasse au canard dans le Midi, en l’honneur du duc de Chartres. La barque du prince était suivie de batelets, où était la fleur des femmes de la haute société orléaniste. Adonc il arrivait, que le prince après avoir tiré, déposait le fusil qui lui avait servi sur un second fusil qui partait, et allait percer, sous la flottaison, le batelet le plus rapproché et la partie inférieure d’une dame qui était dedans. Grand émoi, et l’appel