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Réjane me contait, que sa petite fille âgée de deux ans, disait au sujet de sa fluxion : « Maman joue Geminie de M. Goncou, et maman est enflée. »

Lundi 17 décembre. — Je laisse Porel dans son cabinet, en tête à tête avec les censeurs.

Au milieu de clouements à grands coups de marteau, un conciliabule qui n’en finit pas, entre un machiniste, un pompier au casque qui brille, auquel se mêle la voix de la souffleuse, qui a l’air de sortir d’une cave, pendant qu’un décorateur fait un croquis pour retoucher la chambre de Mlle de Varandeuil. Enfin Porel vient s’asseoir sur les premiers bancs de l’orchestre entre les censeurs.

Admirable de gaucherie cette Réjane ! pendant qu’avec ses bras rouges de laveuse de vaisselle, dans sa toilette de bal de vraie bonne, elle tourne sous les yeux de sa maîtresse… Pas la moindre coquetterie bête de femme, à preuve le chapeau ridicule du bal de la Boule-Noire… C’est vraiment une actrice !… Dans l’idylle du second tableau, quel triste et pudique abandon, mais, mais… je ne sais pas, pour une scène d’amour si poétique, — la robe de bonne me fait une petite impression de froid, — en sera-t-il de même avec le public ?… Oh, elle est merveilleuse, tout le temps, Réjane ! et au moyen d’un dramatique tout simple, du dramatique que je pouvais rêver pour ma pièce… Et comme dans la scène de l’apport de l’ar-