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tendu de Saint-Pétersbourg, m’annonçant qu’Henriette Maréchal a été jouée avec un grand succès, au Théâtre Michel.

La vie de théâtre a cela, qu’elle donne la fièvre à votre cervelle, qu’elle la tient, tout le temps, dans une excitation capiteuse, et qui vous fait craindre, quand vous en serez sorti, que la vie tout tranquillement littéraire du faiseur de livres, paraisse bien vide, bien fade, bien peu remuante.

Lundi 10 décembre. — L’envie de rédiger une pétition à la Chambre des députés, dans laquelle je demanderai la suppression de la commission de censure.

Au milieu de la tirade dramatique du neuvième tableau, dite d’une manière trop mélo, par Mme Crosnier, Porel lui crie : « Mouchez-vous là, et ne craignez pas de vous moucher bruyamment. » Or, cette chose humaine fait la tirade nature, et lui enlève le caractère théâtre qu’elle avait, avant.

Mardi 11 décembre. — Aujourd’hui, le Guignol est démonté, et les Daudet qui assistent à la répétition, pleurent, comme de candides bourgeois. Daudet me dit, que la seule crainte qu’il éprouve pour moi, c’est que la fin de mes tableaux, sans effet théâtral, ne déroute le public.