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l8 LE RÉVIZOR

à Piotr Ivanovitch : « Tout cela me semble bien louche. » Oui. Or Piotr Ivanovitch, d'un geste dis- cret, avait déjà appelé le patron, le traktirchtchik Vlass... Sa femme a accouché il y a trois semaines d'un solide gaillard qui rappelle tout à fait son père et saura bien le remplacer plus tard... Vlass approche et Piotr Ivanovitch lui demande tout bas... « Oui est ce jeune homme? » Et Vlass de répondre : « C'est... » Eh ! ne m'interrompez donc pas, Piotr Ivanovitch, je vous en prie, vous ne saurez rien raconter... Vous sifflez en parlant, à cause de votre dent, je le sais bien... « Ce jeune homme, répond Vlass, mais c'est un fonc- tionnaire. » Telles furent ses paroles. « Il arrive de Petrograd. Et quant à son nom... Ivan Alexan- dre vitch Khlestakof... il doit partir pour le gouver- nement de Saratof... Il est très curieux... Voilà deux semaines qu'il est là... il ne quitte pas le traktir, prend tout à crédit et ne donne pas un kopeck. » Dès que Vlass eut fini de parler, j'eus d'en haut comme une inspiration : « Ohé ! » dis- je à Piotr Ivanovitch...

Dobtchineski. — Pardon, Piotr Ivanovitch, c'est moi qui ai dit : « Ohé ! »

Bobtchineski. — Vous avez commencé, j'ai fini... « Ohé ! » avons-nous dit tous deux. « Mais pourquoi diable reste-t-il ici puisqu'il doit partir pour le gou- vernement de Saratof?... » Et voilà... Il ne peut y avoir de doute... C'est le fonctionnaire...

Le préfet. — Quoi? quel fonctionnaire?

Bobtchineski. — Le fonctionnaire dont il est parlé dans votre lettre... le révizor.

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