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Cette promenade, de pieux habitants de Rome la font aussi pendant la semaine sainte, surtoul le vendredi saint, et, comme aux grâces spirituelles donl les urnes s’assurent et jouissent par l’indulgence attachée à ce pèlerinage il s’ajoule un plaisir matériel, le but et l’objet en sont d’autant plus attrayants. En effet, quiconque, après avoir accompli le pèlerinage, arrive enfin avec des lémoins suffisants à la porte de Saint-Paul, y reçoit un billet qui lui donne le droit de prendre,part, un certain jour, à une pieuse fête populaire dans la villa Mattei. Là, on offre aux personnes admises une collation de pain, de vin, un peu de fromage ou des œufs ; les invités prennent place de côté et d’autre dans le jardin, principalemenl dans le petit amphithéâtre qui s’y trouve. Vis-à-vis, dans le casino de la villa, se rassemble un monde plus relevé, cardinaux, prélats, princes et seigneurs, pour jouir du coup d’œil et prendre aussi leur part de la distribulion fondée par la famille Mallei.

Nous vîmes approcher une procession de jeunes garçons de dix à douze ans, non pas en vêtements ecclésiasliques, mais habillés comme pourraient l’être des apprentis un jour de fête, marchant deux à deux, en habit de même coupe et de même couleur. Ils pouvaient être quarante. Ils chantaient et récitaient dévotement leurs litanies, avec une démarche tranquille et modeste. Un homme âgé, robuste, et qui avait l’air d’un artisan, marchait à leur côté, paraissant régler et diriger tout. On était surpris de voir la file, bien vêtue, se terminer par une douzaine de petits déguenillés qui allaient nu-pieds, et avaienl l’air de mendiants. On nous apprit que cet homme, cordonnier de profession et sans enfants, s’élail d’abord senli disposé à recueillir cl à prendre en apprentissage un enfant pauvre, à l’habiller, à en avoir soin, avec l’assistance de personnes charitables. En donnant cet exemple, il avait réussi à décider d’autres maîtres à recevoir de même des enfants, qu’il avait ensuite pris comme les autres sous sa lutelle. De la sorte s’était formée une petite troupe qu’il tenait sans cesse pieusement occupée, pour la préserver, les dimanches et les jours de fête, d’une funeste oisiveté, exigeant même qu’ils visitassent en un seul jour les églises principales, si éloignées les unes des autres. Cette pieuse