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Un magicien se mêle parmi la foule, montre au peuple un livre couvert de chiffres et lui rappelle ainsi sa passion pour le loto.

Celui-ci se plante dans la presse avec deux visages ; on ne sait quel est le devant, quel est le derrière, s’il vient ou s’il va.

L’étranger aussi doit se résoudre pendant ces jours à être moqué. Les longs habits des hommes du Nord, les grandes perruques, les bizarres chapeaux ronds, étonnent les Romains, et l’étranger devient pour eux un masque.

Comme les peintres étrangers, surtout ceux qui étudient le paysage et les édifices, s’assoient partout en public à Rome et dessinent, on les représente assidus au travail au milieu de la foule du carnaval ; on les voit très-occupés, avec de grands portefeuilles, de longs surtouts et des portecrayons de taille colossale.

A Rome, on voit souvent ivres les mitrons allemands, et on les montre aussi dans leur costume ordinaire, parfois un peu embelli, ivres et tenant une bouteille à la main.

Nous n’avons conservé le souvenir que d’un seul masque frondeur. On devait ériger un obélisque devant l’église de la Trinité-des-Monts ; le public n’en était pas fort content, soit parce que la place est resserrée, soit.parce que, l’obélisque étant petit, il fallait, pour le porter à une certaine élévation, le placer sur un très-haut piédestal : cela suggéra l’idée à quelqu’un de porter, comme bonnet, un grand piédestal blanc, sur lequel était assujetti un tout petit obélisque rougeâtre ; sur le piédestal étaient fixées de grandes lettres, dont le sens n’était peut-être deviné que par le petit nombre.

Tandis que les masques deviennent plus nombreux, les voitures arrivent peu à peu dans le Corso, en suivant l’ordre que nous avons dit : seulement, les voitures, qui viennent du palais de Venise par la gauche, tournent au bout de la rue du Corso et remontent aussitôt par la droite.

Nous avons déjà fait observer que la rue, si l’on retranche les trottoirs, n’a presque partout que la largeur de trois voitures. Tous les trottoirs sont couverts d’échafaudages, de chaises, et beaucoup de spectateurs ont déjà pris leurs places. Une file de voitures descend tout auprès des sièges et des échafaudages et