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sons. Des trottoirs dallés, destinés aux piétons, enlèvent de part et d’autre six à huit pieds. Il ne reste presque partout dans le milieu que douze ou quatorze pas pour les voitures ; on voit que trois voitures au plus peuvent circuler dans cet espace les unes à côté des autres. L’obélisque de la place du Peuple est, dans le carnaval, la limite inférieure de cette rue, et le palais de Venise, la limite supérieure.

Le Corso de Rome est déjà animé tous les dimanches et les jours de fête. Les nobles et les riches Romains s’y promènent une heure ou une heure et demie avant la nuit dans leurs équipages, qui forment une file nombreuse ; les voitures descendent du palais de Venise par la gauche et, si le temps est beau, passant devant l’obélisque, sortent de la ville et parcourent la voie Flaminicnne, quelquefois jusqu’au Ponte-Molle. Ceux qui reviennent, tôt ou tard, prennent la droite, et les deux files de voilures passent l’une auprès de l’autre dans le meilleur ordre. Les ambassadeurs ont le droit de monter et de descendre entre les deux files. Le prétendant, qui séjournait à Rome sous le nom de duc d’Albanie, avait obtenu la même distinction.

Aussitôt qu’on a sonné vêpres, cet ordre est interrompu ; chacun se dirige où il lui plaît et cherche le plus court, non sans gêner souvent beaucoup d’autres équipages, qui en sont arrêtés et retenus dans l’étroit espace.

Cette promenade du soir, qui est brillante dans toutes les grandes villes d’Italie, et qui est imitée dans les petites, ne fut-ce qu’avec quelques voitures, attire dans le Corso beaucoup de piétons ; chacun vient pour voir ou pour être vu.

Le carnaval, comme nous pourrons l’observer bientôt, n’est proprement que la continuation ou plutôt le point culminant dé ces plaisirs, ordinaires les dimanches et les jours de fête. Ce n’est point une chose nouvelle, étrange, unique : il se lie tout naturellement à la vie romaine.

Nous trouverons tout aussi peu étrange de voir bientôt une foule de masques en plein air, accoutumés que nous sommes a voir ainsi, toute l’année, bien des scènes de la vie, sous le ciel pur et serein. A chaque fête, les tapisseries étalées, le sol -jonché de fleurs, les voiles tendus, transforment, pour ainsi dire, les rues en grandes salles et en galeries. Un mort n’est