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au public. Voyez comment vous pourrez arranger cela. Je ne ferai pas attendre le reste du volume.

Je verrai dans quelques jours les travaux d’un habile architecte qui a visité Palmyre, et qui a dessiné les objets avec beaucoup d’intelligence et de goût. Réjouissez-vous avec moi de ce que je suis heureux. Oui, je puis le dire, je ne le fus jamais à ce point. Pouvoir satisfaire avec le plus grand loisir et la plus grande liberté une passion native, oser se promettre d’un plaisir continuel une utilité durable, ce n’est pas peu de chose. Oue ne puis-je seulement communiquer à ceux que j’aime une. partie de mes impressions et de mes jouissances !

J’espère que les nuages de l’horizon politique se dissiperont. Nos guerres modernes font beaucoup de malheureux tandis qu’elles» durent, et ne rendent personne heureux quand elles

sont finies.

Rome, 12 septembre 1187.

C’est une chose entendue, mes chers amis, que je suis un homme qui vit du travail. Ces derniers jours, j’ai plus travaillé que joui. Voici la fin de la semaine, et je vous dois une lettre.

C’est dommage que l’aloès du Belvédère ait choisi pour fleurir l’année de mon absence. En Sicile, je suis arrivé trop tôt ; ici, il n’y en a qu’un pied qui fleurisse cette année, et il n’est pas grand ; il est d’ailleurs placé si haut qu’on ne peut y arriver. Décidément, c’est une plante des Indes, qui se trouve dépaysée même dans ces climats.

Les descriptions du voyageur anglais me font peu de plaisir. Les ecclésiastiques doivent être fort sur leurs gardes en Angleterre, et ils s’en dédommagent en faisant la chasse au reste du public. Le libre Anglais doit s’observer de près dans les écrits qui touchent aux mœurs.

Les hommes à queue ne m’étonnent point. D’après la description, c’est quelque chose de fort naturel. Il s’offre chaque jour à nos yeux des choses bien plus merveilleuses, auxquelles nous ne prenons pas garde, parce qu’elles nous touchent de moins près.

Que B., comme beaucoup de gens qui n’ont eu pendant leur vie aucun sentiment de véritable piété, soit devenu, à ce qu’on dit, dévot dans sa vieillesse, c’est aussi très-bien, pourvu que ces messieurs ne prétendent pas nous édifier.