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utile et plus aimable que lorsqu’il se donne pour tel, cela est surtout vrai des récits de voyages et des voyageurs. L’individualité, les vues, les temps, les circonstances favorables et défavorables, tout se présente diversement pour chacun. Si je connais les devanciers d’un voyageur, je le goûterai à son tour, je profiterai de lui, j’attendrai son successeur, auquel je ferai aussi un bon accueil, lors même que, dans l’intervalle, j’aurai eu le bonheur de visiter moi-même le pays.


SECOND SÉJOUR A ROME


Longa sit huic ætas dominæque potentia terræ,
Sitque sub hac oriens occiduusque dies.


Rome, 8 juin 1787.

J’étais de retour ici avant-hier après un heureux voyage, et, dès le lendemain, la Fête-Dieu m’a réinstallé dans la cité romaine. J’avouerai que j’étais parti de Naples avec quelque chagrin : ce n’était pas seulement l’admirable contrée que je laissais derrière moi, c’était une lave puissante, qui, du sommet de la montagne, s’acheminait vers la mer, et que j’aurais voulu observer de près, étudier par moi-même dans sa marche, dont j’avais lu et ouï dire tant de choses. Aujourd’hui cependant mes regrets de cette grande scène de la nature sont apaisés ; et ce n’est pas la pieuse cohue de la fête, car, avec un ensemble imposant, elle offre ça et là des détails qui blessent le goût, c’est la vue des tapis brodés d’après les cartons de Raphaël qui m’a ramené dans la sphère des hautes méditations. Les plus excellents, dont l’authenticité est la plus certaine, sont étalés ensemble ; les autres, qui sont probablement des élèves de Raphaël, ou de ses contemporains et de ses émules, ne figurent pas indignement auprès des premiers et couvrent des espaces immenses.

Rome, 16 juin 1787.

Laissez-moi vous dire encore, mes chers amis, que je me sens très-bien, que je me retrouve toujours davantage et que