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évident ce que j’avance. Les plus petits enfants sont occupés de diverses manières. Un grand nombre portent des poissons à vendre de Sainte-Lucie à la ville ; on en voit d’autres fort souvent dans le quartier de l’arsenal^ soit dans les lieux où les charpentiers ont travaillé et où se trouvent des copeaux, ou bien sur le rivage où la mer a rejeté des rameaux et du menu bois, que les enfants ramassent jusqu’aux moindres morceaux dans de petites corbeilles. Des enfants tout jeunes, qui ne savaient que se traîner par terre, réunis à leurs aînés, qui pouvaient avoir cinq ou six ans, étaient occupés à ce petit métier. Ils s’avancent ensuite dans la ville avec leur panier, et se placent comme au marché avec leurs bûchettes. L’artisan, le petit bourgeois, s’en accommodent, les réduisent en braise sur leur trépied pour se chauffer, ou les emploient dans leur modeste cuisine. D’autres enfants colportent l’eau des sources sulfureuses, qu’on boit en abondance, surtout au printemps. D’autres cherchent un petit bénéfice à acheter et revendre aux autres enfants du fruit, du miel coulé, des gâteaux et des sucreries, lout au moins pour en avoir leur part gratis. C’est vraiment joli de voir un de ces enfants, dont toute la boutique et les ustensiles consistent en une planche et un couteau, colporter un melon d’eau ou un potiron à moitié cuit, une troupe d’enfants se rassembler alentour, et lui, posant sa planche par terre, se mettre à partager le fruit en petits morceaux. Les acheteurs mesurent très-sérieusement s’ils reçoivent assez pour leur piécette de cuivre, et le petit marchand emploie avec ses chalands avides les mêmes précautions, pour n’être pas trompé d’une parcelle. Je suis persuadé qu’un plus long séjour permettrait de recueillir bien d’autres exemples de cette industrie enfantine.

Un très-grand nombre de personnes, jeunes garçons ou adultes, la plupart fort mal vêtus, chargent sur des ânes et emportent les balayures de la ville. Les champs voisins ne sont que jardins potagers, et c’est un plaisir de voir quelle incroyable quantité de légumes est apportée en ville tous les jours de marché, avec quelle industrie les hommes reportent aussitôt dans les champs, pour accélérer la végétation, les débris superflus, rejetés par la cuisinière. La consommation des légumes étant énorme, les tiges et les feuilles de choux-fleurs, de brocolis,