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Koella ; il copie parfaitement à la sépia les bustes antiques, et il est versé dans l’histoire de l’art.

Rome, 7 novembre.

Je suis ici depuis sept jours, et je me fais peu à peu une idée générale de la ville. Nous la parcourons souvent. Je me familiarise avec les plans de Rome ancienne et de Rome moderne ; j’observe les ruines, les édifices, je visite une villa puis une autre ; je ne m’occupe que fort lentement des plus grandes merveilles ; je me contente d’ouvrir les yeux ; je regarde, je vais et je viens, car c’est à Rome seulement qu’on peut se préparer à étudier Rome. Mais avouons que c’est un pénible et triste travail de déterrer la Rome antique de dessous la moderne, et pourtant il faut le faire, et l’on finit par y goûter une satisfaction inestimable. On trouve les vestiges d’une magnificence et d’une destruction qui vont l’une et l’autre au delà de notre imagination. Ce que les barbares ont laissé debout, les architectes de Rome moderne l’ont dévasté.

Quand on considère une existence qui remonte à plus de deux milie ans, qui a subi par les vicissitudes des temps des changements si divers et si profonds, et pourtant toujours le même sol, les mêmes collines, souvent les mêmes colonnes et les mêmes murailles, et, dans le peuple, quelques traces encore de l’ancien caractère, on se trouve initié aux grands arrêts de la destinée, et l’observaleur a d’abord de la peine à démêler comment Rome succède à Rome, et non-seulement la ville moderne à la ville ancienne, mais, les unes aux autres, les diverses époques de l’ancienne et de la nouvelle. Je me borne premièrement à tâcher de trouver moi-même les points à demi couverts ; c’est seulement alors qu’on peut utiliser parfaitement les beaux travaux.préparatoires ; car, depuis le quinzième siècle jusqu’à nos jours, des artistes et des savants de grand mérite ont consacré leur vie entière à ces recherches.

Et cette merveille agit sur nous tout doucement, à mesure que nous parcourons la ville à la hâte pour arriver aux objets les plus grands. En d’autres lieux, il faut chercher ce qui est remarquable : ici il nous surcharge et nous accable. Qu’on chemine ou qu’on s’arrête, il s’offre aux regards des paysages de toute sorte, palais et ruines, jardins et déserts, lointains et