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quelles je chantai les premières ; elle n’est plus que poussière cette foule bienveillante ; hélas ! le premier écho s’est évanoui ; mes chants retentissent pour une multitude étrangère : ses louanges même oppressent mon cœur ; et ceux qui prenaient autrefois plaisir à mes vers, s’ils vivent encore, sont errants et dispersés dans le monde.

Et une ardeur, longtemps désaccoutumée, m’entraîne vers ce grave et silencieux empire des esprits ; il se berce maintenant en vagues mélodies, mon chant, qui soupire, pareil à la harpe d’Éole ; un frisson me saisit ; les larmes suivent les larmes ; je sens mon cœur rigide s’amollir et se fondre : ce que je possède, je le vois comme dans le lointain, et ce qui a disparu devient pour moi la réalité.