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entre les inventions des nouveaux venus et l’état de choses aboli, pour la majorité des sujets, une ligne de démarcation perceptible.

Les Iraniens, n’étant qu’une poignée d’hommes, furent à peine en possession du pouvoir, que l’immense esprit assyrien les entoura de toutes parts, les saisit, les serra, et leur communiqua son vertige. On peut déjà se rendre compte sous le fils de Cyrus, sous Cambyse, de la part de parenté que la nature fatalement superbe et enflée des Sémites chamitisés pouvait déjà réclamer avec la personne du souverain. Heureusement, cet alliage ne s’était pas encore généralisé. Le témoignage d’Hérodote vient nous prouver que l’esprit arian tenait bon contre les assauts de l’ennemi domestique. Rien ne le montre mieux que la fameuse conférence des sept chefs après la mort du faux Smerdis (1)[1].

Il s’agissait de donner aux peuples délivrés une forme de gouvernement convenable. Le problème n’eût pas existé pour le génie assyrien, qui, du premier mot, aurait proclamé l’éternelle légitimité du despotisme pur et simple ; mais il fut envisagé mûrement et résolu, non sans difficulté, par les guerriers dominateurs qui le soulevèrent. Trois opinions se trouvèrent en présence. Otanès opina pour la démocratie ; Mégabyzès parla en faveur de l’oligarchie. Darius, ayant loué l’organisation monarchique, qu’il affirma être la fin inévitable de toutes les formes de gouvernement possibles, gagna les suffrages à sa cause. Cependant il avait affaire à des associés tellement fous d’indépendance, qu’avant de remettre le pouvoir au roi élu, ils stipulèrent qu’Otanès et toute sa maison resteraient à jamais affranchis de l’action de l’autorité souveraine, et libres, sauf le respect des lois. Comme à l’époque d’Hérodote des sentiments de cette énergie n’existaient plus guère parmi les Perses, décidément déchus de leur primitive valeur ariane, l’écrivain d’Ionie prévient sagement ses lecteurs que le fait qu’il raconte va leur paraître étrange : il ne l’en maintient pas moins (2)[2].



(1) Hérodote, Thalie, LXXX et passim.

(2) Hérodote, Thalie, LXXX.


  1. (1) Hérodote, Thalie, LXXX et passim.
  2. (2) Hérodote, Thalie, LXXX.