Page:Gobineau Essai inegalite races 1884 Vol 1.djvu/594

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

regrettable : il ne fut bon ni pour les initiateurs ni pour les néophytes. Ceux-ci ne manquèrent pas de souiller le sang iranien par leur alliance, et, quant à la religion meilleure qu’on leur donnait, ils la pervertirent, afin de l’accommoder à leur incurable esprit de superstition (1)[1].

La fin des nations iraniennes était ainsi marquée bien près du jour de leur triomphe. Toutefois, tant que leur essence n’était pas encore trop mélangée, leur supériorité sur l’univers civilisé était certaine et incontestable : ils n’avaient pas de compétiteurs. L’Asie inférieure entière se soumit à leur sceptre. Les petits royaumes d’au-delà de l’Euphrate, ce rempart soigneusement entretenu par les Pharaons, furent rapidement englobés dans les satrapies. Les villes libres de la côte phénicienne s’annexèrent à la monarchie perse, avec les États des Lydiens. Un jour vint où il ne resta que l’Égypte elle-même, antique rivale qui, pour les héritiers des dynastes chaldéens, put valoir la peine d’une campagne (2)[2]. C’était devant ce colosse



(1) Burnouf, Commentaire sur le Yaçna, t. I, p. 351. — Ce savant, en citant le passage d’Hérodote sur lequel se base cette opinion, élève quelques doutes quant à sa portée. Je me bornerai à transcrire ici l’assertion de l’historien grec ; elle suffit entièrement à mon but : « Clio, CXXXI : Voici les coutumes qu’observent, à ma connaissance, les Perses. Leur usage n’est pas d’élever aux dieux des statues, des temples, des autels. Ils traitent, au contraire, d’insensés ceux qui le font. C’est, à mon avis, parce qu’ils ne croient pas, comme les Grecs, que les dieux aient une forme humaine. Ils ont coutume de sacrifier à Jupiter sur le sommet des plus hautes montagnes, et donnent le nom de Jupiter à toute la circonférence du ciel. Ils font encore des sacrifices au soleil, à la lune, à la terre, au feu, à l’eau et aux vents, et n’en offrent de tout temps qu’à ces divinités. Mais ils y ont joint, dans la suite, le culte de Vénus Céleste ou Uranie, qu’ils ont emprunté des Assyriens et des Arabes. Les Assyriens donnent à Vénus le nom de Mylitta, les Arabes celui d’Alitta, et les Perses l’appellent Mitra. » Ainsi ce culte de Mithra, qui infecta plus tard tout l’occident romain, commença par saisir les Perses. C’est, en quelque sorte, le cachet de l’invasion du sang sémitique. — Bœttiger dit que, sous le règne de Darius Ochus, le magisme s’était déjà très rapproché de l’hellénisme et du fétichisme par l’adoption du culte d’Anaïtis. (Ideen zur Kunstmythologie, t. I, p. 27.)

(2) On a vu ailleurs les Égyptiens se défendre, ou même quelquefois attaquer, quand il le fallait absolument, au moyen de leurs troupes

  1. (1) Burnouf, Commentaire sur le Yaçna, t. I, p. 351. — Ce savant, en citant le passage d’Hérodote sur lequel se base cette opinion, élève quelques doutes quant à sa portée. Je me bornerai à transcrire ici l’assertion de l’historien grec ; elle suffit entièrement à mon but : « Clio, CXXXI : Voici les coutumes qu’observent, à ma connaissance, les Perses. Leur usage n’est pas d’élever aux dieux des statues, des temples, des autels. Ils traitent, au contraire, d’insensés ceux qui le font. C’est, à mon avis, parce qu’ils ne croient pas, comme les Grecs, que les dieux aient une forme humaine. Ils ont coutume de sacrifier à Jupiter sur le sommet des plus hautes montagnes, et donnent le nom de Jupiter à toute la circonférence du ciel. Ils font encore des sacrifices au soleil, à la lune, à la terre, au feu, à l’eau et aux vents, et n’en offrent de tout temps qu’à ces divinités. Mais ils y ont joint, dans la suite, le culte de Vénus Céleste ou Uranie, qu’ils ont emprunté des Assyriens et des Arabes. Les Assyriens donnent à Vénus le nom de Mylitta, les Arabes celui d’Alitta, et les Perses l’appellent Mitra. » Ainsi ce culte de Mithra, qui infecta plus tard tout l’occident romain, commença par saisir les Perses. C’est, en quelque sorte, le cachet de l’invasion du sang sémitique. — Bœttiger dit que, sous le règne de Darius Ochus, le magisme s’était déjà très rapproché de l’hellénisme et du fétichisme par l’adoption du culte d’Anaïtis. (Ideen zur Kunstmythologie, t. I, p. 27.)
  2. (2) On a vu ailleurs les Égyptiens se défendre, ou même quelquefois attaquer, quand il le fallait absolument, au moyen de leurs troupes mercenaires. Des Grecs en faisaient le nerf. (Wilkinson, Customs and Manners, etc., t. I, p. 211.)