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au rebours des Mantchous, qui se sont pâmés d’admiration devant de si belles choses. Ils y mettront courageusement la hache et renouvelleront, sous de nouvelles formes, la proscription littéraire de Tsin-chi-hoang-ti. À la seconde génération, ils seront beaucoup plus forts au point de vue du nombre. Un rang serré de métis, nés des femmes indigènes, leur aura créé un heureux intermédiaire avec les populations. Ces métis, instruits, d’une part, dans la pensée de leurs pères, et, de l’autre, dominés par le sentiment des compatriotes de leurs mères, adouciront ce que l’importation intellectuelle avait de trop européen, et l’accommoderont mieux aux notions locales. Bientôt, de génération en génération, l’élément étranger ira se dispersant dans les masses en les modifiant, et l’ancien établissement chinois, cruellement ébranlé, sinon renversé, ne se rétablira plus ; car le sang arian des kschattryas est épuisé depuis longtemps, et si son œuvre était interrompue, elle ne pourrait plus être reprise.

D’un autre côté, les graves perturbations infusées dans le sang chinois ne conduiraient certainement pas, je viens de le dire, à une civilisation à l’européenne. Pour transformer trois cents millions d’âmes, toutes nos nations réunies auraient à peine assez de sang à donner, et les métis, d’ailleurs, ne reproduisent jamais ce qu’étaient leurs pères. Il faut donc conclure :

1° Qu’en Chine, des conquêtes provenant de la race jaune et ne pouvant ainsi qu’humilier la force des vainqueurs devant l’organisation des vaincus, n’ont jamais rien changé et ne changeront jamais rien à l’état séculaire du pays ;

2° Qu’une conquête des blancs, dans de certaines conditions, aurait bien la puissance de modifier et même de renverser pour toujours l’état actuel de la civilisation chinoise, mais seulement par le moyen des métis.

Encore cette thèse, qui peut être théoriquement posée, rencontrerait-elle, en pratique, de très graves difficultés, résultant du chiffre énorme des populations agglomérées, circonstance qui rendrait fort difficile, à la plus nombreuse émigration, d’entamer sérieusement leurs rangs.