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s’interdire les excès inutiles, faute d’imagination chez les sujets pour en être plus effrayés qu’irrités, pour les comprendre et les tolérer. Ainsi s’explique la constitution particulière de la royauté en Chine.

Mais un rapport général de la première constitution politique de ce pays avec les organisations spéciales de tous les rameaux blancs, rapport curieux que je n’ai pas encore fait ressortir, c’est l’institution fragmentaire de l’autorité et sa dissémination en un grand nombre de souverainetés plus ou moins unies par le lien commun d’un pouvoir suprême. Cette sorte d’éparpillement de forces, nous l’avons vue en Assyrie, où les Chamites, puis les Sémites, fondèrent tant d’États isolés sous la suzeraineté, reconnue ou contestée, suivant les temps, de Babylone et de Ninive ; dissémination si extrême, qu’après les revers des descendants de Salomon il se créa trente-deux États distincts dans les seuls débris des conquêtes de David, du côté de l’Euphrate (1)[1]. En Égypte, avant Ménès, le pays était également divisé entre plusieurs princes, et il en fut de même du côté de l’Inde, où le caractère arian s’était toujours mieux conservé. Une complète réunion territoriale de la contrée n’eut jamais lieu sous aucun prince brahmanique.

En Chine, il en alla autrement, et c’est une nouvelle preuve de la répugnance du génie arian pour l’unité dont, suivant l’expression romaine, l’action se résume dans ces deux mots : reges et greges.

Les Arians, vainqueurs orgueilleux dont on ne fait pas facilement des sujets, voulurent, toutes les fois qu’ils se trouvèrent maîtres des races inférieures, ne pas laisser aux mains d’un seul d’entre eux les jouissances du commandement. En Chine, donc, comme dans toutes les autres colonisations de la famille, la souveraineté du territoire fut fractionnée, et sous la suzeraineté précaire d’un empereur une féodalité, jalouse de ses droits (2)[2], s’installa et se maintint depuis l’invasion des Kschattryas



(1) Movers, das Phœnizische Alterthum, t. II, 1re partie, p. 374. – I, Rois, 20, 24, 25.

(2) « Sous les trois premières races, l’empire était entièrement composé de principautés, de fiefs et d’apanages héréditaires. Les

  1. (1) Movers, das Phœnizische Alterthum, t. II, 1re partie, p. 374. – I, Rois, 20, 24, 25.
  2. (2) « Sous les trois premières races, l’empire était entièrement composé de principautés, de fiefs et d’apanages héréditaires. Les hommes qui en étaient investis avaient sur leurs subordonnés une autorité plus grande que celle des pères sur leurs fils, des chefs de famille sur leurs propriétés... Chaque chef gouvernait son fief comme sa propriété héréditaire. » (Ma-touan-lin, cité par M. E. Biot, voir le Tcheou-li, t. I, Introduct., p. XXVII.)