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sur des êtres brutaux est complète en Égypte comme en Assyrie, comme à Tyr. La raison en est que, dans tous les pays où l’élément noir se trouva ou se trouve soumis au pouvoir des blancs, l’autorité emprunte un caractère constant d’atrocité, d’une part, à la nécessité de se faire obéir d’êtres inintelligents, et, d’autre part, à l’idée même que ces êtres se font des droits illimités de la puissance à leur soumission.

Pour les dissemblances, leur source est en ceci que le rameau civilisateur de l’Égypte était supérieur en mérite aux branches de Cham et de Sem. Dès lors, les Sanscrits Égyptiens avaient pu apporter, dans le pays de leur conquête, une organisation assez différente et certainement plus morale ; car ce n’est pas un point à controverser que, partout où le despotisme est le seul gouvernement possible, l’autorité sacerdotale, même poussée à l’extrême, a toujours les résultats les plus salutaires, parce que, du moins, est-elle toujours plus trempée d’intelligence.

Après les rois et les prêtres de l’Égypte, il ne faut pas oublier les nobles, qui, pareils aux Kchattryas de l’Inde, avaient seuls le droit de porter les armes et l’emploi de défendre le pays. En supposant qu’ils s’en soient acquittés avec distinction, ils paraissent avoir mis non moins d’énergie à opprimer leurs inférieurs : je viens de l’indiquer tout à l’heure, et il n’est pas mal à propos d’y revenir. Le bas peuple de l’Égypte était aussi malheureux que possible, et son existence, à peine garantie par les lois, se trouvait constamment exposée aux violences des hautes classes. On le contraignait à un travail sans relâche ; l’agriculture dévorait et ses sueurs et sa santé ; logé dans de misérables cabanes, il y mourait de fatigue et de maladie sans que personne s’en préoccupât, et des admirables moissons qu’il produisait, de fruits merveilleux qu’il faisait croître, rien ne lui appartenait. À peine lui en était-il accordé une part insuffisante à sa nourriture. Tel est le témoignage porté sur l’état des basses classes en Égypte par les écrivains de l’antiquité grecque (1)[1]. À la vérité, on peut citer également, dans un sens

  1. (1) Hérodote, 11, 47.