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leur arbre généalogique. De ce moment, le cachet physique qui devait faire reconnaître la postérité de Chanaan et la réserver à la servitude des enfants plus pieux, était à jamais imprimé sur l’ensemble des nations formées par l’union trop intime des conquérants blancs avec leurs vaincus de race mélanienne.

En même temps que cette fusion matérielle s’opérait, une autre toute morale avait lieu, qui achevait de séparer, à jamais, les nouvelles populations métisses de l’antique souche noble, à laquelle elles ne devaient plus qu’une partie de leur origine. Je veux parler du rapprochement entre les langages. Les premiers Chamites avaient apporté du nord-est un dialecte de cet idiome originellement commun aux familles blanches, dont il est encore aujourd’hui si facile de reconnaître les vestiges dans les langues de nos races européennes. À mesure que les tribus immigrantes s’étaient trouvées en contact avec les multitudes noires, elles n’avaient pas pu empêcher leur langage naturel de s’altérer ; et quand elles se trouvèrent alliées de plus en plus avec les noirs, elles le perdirent tout à fait. Elles l’avaient laissé envahir par les dialectes mélaniens de façon à le défigurer.

À la vérité, nous ne sommes pas complètement en droit d’appliquer, péremptoirement, aux langues de Cham les réflexions que suggère ce que nous connaissons du phénicien et du libyque. Beaucoup d’éléments, développés postérieurement par les migrations sémitiques, se sont infusés dans ces idiomes métis, et on pourrait objecter que les apports nouveaux possédèrent un autre caractère que celui des langues formées d’abord par les Chamites noirs. Je ne le crois cependant pas. Ce que nous savons du chananéen, et l’étude des dialectes berbères, paraissent révéler un système commun de langage imbu de l’essence qu’on a appelée sémitique, à un degré supérieur à ce qu’en possèdent les langues sémitiques elles-mêmes, par conséquent s’éloignant davantage des formes appartenant aux langues des peuples blancs, et conservant ainsi moins de traces de l’idiome typique de la race noble. Je ne fais pas difficulté, pour ma part, de considérer cette révolution linguistique comme