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Kerbelay-Houssein arrêta d’un geste, paraissait avoir une quarantaine d’années. Sa figure semblait douce ou plutôt doucereuse et craintive ; sa bouche souriait, ses regards s’échappaient en dessous et circulaient rapidement autour de lui. Il était vêtu à la façon kurde, mais portait un bonnet de feutre blanc de dimensions très-exiguës ; à la main il tenait un petit bouclier rond, couvert de ganses et de glands qu’il serrait convulsivement pour s’en garantir contre la lapidation ; il portait un sabre et un poignard ; mais ne semblait nullement tenté de s’en servir.

— Que veux-tu, chien ? lui dit sévèrement Kerbelay-Houssein.

— Monseigneur, répliqua le Shemsiyèh, avec son sourire inimitable et une extrême humilité, je demande la permission à Votre Excellence de me joindre à la caravane pour aller jusqu’à Avadjyk. Je n’ai pas l’intention d’être à charge à personne ; je ne demande pas la charité. Veuillez seulement m’autoriser à me joindre à vous, il ne m’en faut pas davantage.

Un cri général de réprobation s’éleva de toutes parts.

— Qu’est-ce que cela veut dire ? demanda Valerio. Est-ce que cet homme est un malfaiteur ou un pestiféré ?

Kerbelay-Houssein leva légèrement les épaules  :

— C’est tout bonnement un Shemsiyèh, répondit-il tout bas à son interlocuteur ; il adore les idoles des