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V


LES AMANTS DE KANDAHAR


Vous demandez s’il était beau ? Beau comme un ange ! Le teint un peu basané, non de cette teinte sombre, terreuse, résultat certain d’une origine métisse ; il était chaudement basané comme un fruit mûri au soleil. Ses cheveux noirs bouclaient, en profusion d’anneaux, sur les plis serrés de son turban bleu rayé de rouge ; une moustache fine, ondée, un peu longue caressait le contour délicat de sa lèvre supérieure, nettement coupée, mobile, fière, respirant la vie, la passion. Ses yeux doux et profonds s’allumaient facilement d’éclairs. Il était grand, vigoureux, mince, large des épaules, étroit des hanches. À personne l’idée ne fut venue de s’enquérir de sa race ; il était clair que le sang afghan le plus pur animait son essence et que, en le contemplant, on avait sous les yeux le descendant authentique de ces anciens Parthes, les Arsaces, les Orodes, sous les pas desquels le monde romain a frémi d’une juste épouvante. Sa mère, à sa