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— Bèh ! bèh ! bèh !

Et s’administra une balafre sur le crâne, qui se mit à saigner. Pendant ce temps, le moulla avait déplié le précieux document et, le mettant sous les yeux de son public, commença à lire d’une voix imposante. Mais avant de se joindre aux auditeurs, si vivement intéressés, il faut que le lecteur sache ce que sont des lettres de tôbèh.

Quand une dame a donné des occasions de scandale trop indiscrètement répétées, l’opinion publique se tourne malheureusement contre elle, et il en résulte des propos fâcheux. Alors le juge prend l’étourdie sous sa conduite ; il lui demande des cadeaux fréquents, il se tient au courant de ses faits et gestes, et, après quelques mésaventures, la dame, assez généralement, éprouve le besoin de changer de vie. Elle ne peut y parvenir qu’en se mariant. Mais comment se marier dans une situation aussi difficile que la sienne ? D’une façon toute simple. Elle va trouver un personnage religieux, lui expose son cas, lui peint sa désolation, et le personnage religieux tire son écritoire. Il lui remet un bout de papier attestant le regret du passé qui dévore la pénitente, et comme Dieu est essentiellement miséricordieux, lorsqu’on a le ferme propos de ne pas retomber dans ses torts, l’ancienne pécheresse se trouve blanchie de la tête aux pieds ; personne n’a plus le moindre droit de suspecter la solidité de ses principes, et elle est aussi mariable que n’importe