Page:Gobineau - Nouvelles asiatiques 1876.djvu/135

Cette page a été validée par deux contributeurs.

rant que c’était pour s’humilier devant Dieu et obtenir quelque grâce, ne manquèrent pas de déposer une petite pièce de monnaie dans la main qui leur était tendue enveloppée, par modestie, d’un coin du manteau, et accompagnèrent chacun leur offrande d’un signe de tête bienveillant et d’une formule de propitiation. Amynèh, ayant ainsi fait ce qui était en son pouvoir pour se concilier la bonté et l’indulgence divine, se dirigea vers la maison de sa belle-sœur et y arriva bientôt.

Cette belle-sœur n’était pas un caractère ordinaire. Elle mérite la peine d’un portrait. On l’appelait de son nom Zemroud-Khanoum, madame Émeraude. Elle avait dix ans au moins de plus que Kassem et lui avait servi de mère. Aussi, éprouvait-il pour elle une profonde considération, un respect très-grand, et le tout mélangé de quelque crainte, sentiment, je dis le dernier, qui était partagé, à un degré éminent, par Aziz-Khan, mari de la dame. À la vérité, Zemroud-Khanoum ne faiblissait pas sur les points où elle avait fixé ses convictions. Épousée comme seconde femme par le général son époux, elle avait mis six mois à faire renvoyer la première ; mais elle avait réussi. Depuis lors, bien qu’Aziz-Khan eût plusieurs fois essayé de lui faire comprendre cette vérité palpable, qu’un homme de son rang et de sa fortune se faisait tort en n’ayant qu’une seule personne sacrée dans l’enceinte de son enderoum, c’est-à-dire en ne possédant qu’une