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couverte d’une forêt de cheveux noirs ébouriffés, des yeux flamboyants, l’aspect sauvage, dur et sévère, se trouva à deux pas de Mirza-Kassem. Il portait sur l’épaule un bâton de cuivre jaune terminé par un enlacement de serpents ; à son côté, était suspendue la noix de coco appelé kouskoul, particulière à sa confrérie. Cet homme avait une apparence si étrange, même pour un derviche, que les yeux de Mirza-Kassem s’attachèrent involontairement sur lui et ne purent s’en détourner. À son tour, l’étranger considéra celui qui le fixait ainsi.

— Le salut soit sur vous lui dit-il, d’une voix douce et mélodieuse bien inattendue chez un être pareil.

— Et sur vous le salut et la bénédiction ! lui répondit poliment Mirza-Kassem.

— Je suis, poursuivit le derviche, ainsi que Votre Excellence peut le voir, un misérable pauvre, moins qu’une ombre, dévoué à servir Dieu et les Imams. J’arrive dans cette ville et si vous pouvez me loger cette nuit sur votre terrasse, dans votre écurie, où vous voudrez, je vous en serai reconnaissant.

— Vous me comblez ! répondit Mirza-Kassem, par une telle faveur. Daignez suivre votre esclave, il va vous montrer le chemin.

Le derviche porta la main à son front, en signe d’acquiescement et s’en alla avec son guide. Ils traversèrent ensemble plusieurs rues tortueuses où les chiens du bazar commençaient déjà à se rassembler ;